Voici donc mon dernier billet dans l’Educateur, cette revue professionnelle que je ne peux que vous conseiller de lire régulièrement et attentivement. J’aurai rédigé un peu plus de deux-cents textes syndicaux pour vous tenir au courant des problèmes qui surgissent et des démarches que le SEJ a entamées pour tenter de répondre aux défis qui nous étaient, et nous sont, posés.

Pour l’anecdote, en 2005, mes deux premiers billets ont été consacrés à des mesures d’économie souhaitées dans l’enseignement. Le Gouvernement voulait notamment réduire les salaires de l’ensemble du corps enseignant jurassien, tous niveaux d’enseignement confondus. J’étais alors, et déjà, membre de la commission de gestion et des finances du Parlement. Un mandat qui s’est avéré décisif pour le rejet de la proposition gouvernementale. C’était le premier combat mené et gagné avec ma casquette de secrétaire général. La ministre de l’époque, dont je tairai le nom, m’en avait voulu. Je crois que maintenant qu’elle est conseillère fédérale, elle a oublié cet épisode.

Plaisanterie mise à part, les relations entre le Département qui s’appelait de l’Éducation alors, ont toujours été respectueuses, dans la compréhension mutuelle des rôles que nous occupions de part et d’autre. J’ai eu le plaisir de connaitre cette collaboration jusqu’à mon départ, puisque c’est encore valable avec le Département désormais de la Formation, de la Culture et des Sports. Il en fut de même avec les chefs de service successifs, à une exception près, je me dois de le dire, même si ce fut très provisoire.   

Les pratiquement dix-neuf années que j’aurai passées au secrétariat général du SEJ ont été passionnantes, même si les combats se sont succédé de façon permanente. C’est que la recherche d’économie est devenue permanente dans notre canton. Je pars avec le sentiment, non du devoir accompli, je déteste cette expression, mais d’avoir fait tout ce que j’ai pu pour préserver et développer une école et une formation de qualité, objectif inatteignable sans un corps enseignant de haut niveau, reconnu et respecté. Inatteignable aussi sans une organisation professionnelle forte comme l’est le SEJ. Les autorités, quand elles s’adressent à nous, savent que nous représentons une part très importante du corps enseignant jurassien. Il faut maintenir cette force, absolument. N’hésitez pas à encourager vos collègues non syndiqué·es à corriger leur erreur.

Combattre avec insistance l’image caricaturale des enseignant·es, notamment en lien avec leur temps de travail, véhiculée par des élu·es, des parents, des responsables cantonaux est une lutte perpétuelle à mener. Je ne peux pour illustrer cette réalité que citer Michel Girardin, lors d’un cours auquel je participais à l’École normale voici plus de quarante ans : « il faut avoir été enseignant pour savoir à quel point on est bien quand on ne l’est plus. »

J’ai vécu personnellement cette réalité quand je suis devenu secrétaire général du SEJ. Même si cette tâche est exigeante, on vit différemment que quand on est enseignant. Quand on quitte le bureau, les corrections et préparations ne vous courent pas après. Quand vous êtes en weekend ou en vacances, vous l’êtes vraiment. Votre esprit n’est peut-être pas totalement libéré, en raison des attaques incessantes qui se développent contre la fonction publique en générale, contre les enseignant·es en particulier, mais les obligations professionnelles ne sont pas du même niveau. Et en dix-neuf ans au secrétariat du SEJ, je n’ai jamais été confronté à des comportements violents à mon égard. Ce qui peut paraitre étonnant au demeurant.

J’ai vécu une dernière année compliquée à cette fonction. Pour simplifier, 2023 devait être ma meilleure année de retraite, elle s’est transformée en ma pire année de travail. Je remercie les autorités jurassiennes pour leur effort dans ce sens. Le xième plan d’économies qui se développe aujourd’hui n’y est pas étranger. Je continuerai de me battre, au Parlement, mais sans avoir la casquette de secrétaire général du SEJ. En termes d’indépendance, ce sera un avantage.

Merci pour votre confiance durant toutes ces années. Prenez soin de vous, non égoïstement mais collectivement, pour défendre la profession que vous exercez et l’école que vous construisez jour après jour, avec vos collègues, pour le bien des élèves que vous accueillez. 

Rémy Meury, secrétaire général du SEJ