SAEN : Interrogations politico-syndicales ... - 03/2024
Dans notre beau canton, les enseignant·es disposent de deux associations professionnelles reconnues leur permettant de discuter avec leurs autorités : le SSP et le SAEN. Ces deux entités travaillent en étroite collaboration sur la plupart des sujets et siègent ensemble dans de nombreuses commissions et autres groupes de travail. Si la philosophie et le fonctionnement de chaque syndicat diffèrent assez largement, pour des raisons historiques et d’appartenances extra-cantonales notamment, la défense de l’école et des enseignant·es les réunit généralement.
Mais il arrive parfois que, pour diverses raisons, les débats s’animent quelque peu et que certains points de vue divergent de manière importante, comme nous allons l’évoquer ici. Est-ce positif ou négatif ? À vous d’en juger, à propos des quatre sujets suivants:
a) Pour commencer, le postulat pour un meilleur encadrement des élèves à l’école obligatoire et la motion populaire pour le maintien des classes spécialisées, deux textes acceptés en janvier par le Grand Conseil (GC).
Sur le fond tout d’abord, le comité SAEN est très sensible à ces préoccupations et les aborde fréquemment avec le département. Mais il se questionne sur la forme de ces actions. Pourquoi demander au GC de se prononcer sur des questions qui relèvent de la compétence des communes et de leurs directions d’école ? Pourquoi se focaliser sur des points aussi spécifiques que le nombre d’élèves par classe et celui des classes FS (formation spécialisée), au risque de perdre de vue les indispensables réflexions globales menées actuellement ?
Si une diminution de la moyenne des élèves par classe ne nous semble pas prioritaire actuellement, il est par contre indispensable d’apporter des aides ciblées, rapides et efficaces là où sont les difficultés, et les moyens nécessaires risquent de manquer si on les disperse dans l’ensemble des classes.
À propos des classes FS, la pratique cantonale est très diversifiée. Fermer les classes FS là où elles sont utiles n’est effectivement pas une bonne option, et nous nous y opposons également. Toutefois, il est absolument nécessaire de travailler sur la question de l’inclusion, de chercher ensemble des solutions respectueuses des droits et des besoins des élèves en difficulté, qui ne mettent pas en danger le travail des enseignant·es et la qualité de leur enseignement. Ce dossier a une importance pédagogique et humaine élevée, et la recherche de solutions innovantes et efficientes passe par la réflexion et la collaboration communes de tous les partenaires de l’école, bien plus que par des décisions politiques ponctuelles et sectorielles.
b) Les deux points suivants concernent l’évaluation des fonctions (projet ECFE) et les négociations salariales actuellement gelées. Le 1er février dernier, le SSP a décidé en assemblée générale extraordinaire de refuser ces deux projets. Le comité SAEN comprend très bien les réticences de ses collègues et les partage assez largement. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que ces travaux ont été lancés à la demande des syndicats, au sortir de la grève de 2016. Certes, les propositions actuelles de nos autorités ne suffisent pas. Plusieurs points doivent encore être améliorés. Le SAEN refusera par exemple des baisses de salaires pour certaines catégories d’enseignant·es au prétexte d’en valoriser d’autres. Et les actuelles propositions de revalorisation pour les rémunérations les plus basses (au degré 1-2) ne sont pas suffisantes. Toutefois, selon le comité SAEN, refuser de poursuivre toute discussion conduira inévitablement à un blocage, et au pire, à un abandon pur et simple de ces dossiers importants, sur lesquels nous travaillons depuis plusieurs années. Paradoxalement, cela risque de fragiliser la position des syndicats d’enseignant·es.
Sur les quatre points développés ci-dessus, nos collègues du comité SSP se sont montré·es combatif·ves et ont fourni un travail important, que nous saluons. Toutefois, le comité SAEN continuera de se battre selon sa stratégie habituelle. De nombreux dossiers importants sont en cours de réflexion à tous les niveaux de l’école, que ce soit dans les centres scolaires, au niveau cantonal, romand et même fédéral. Il nous parait contre-productif de jouer la carte de l’opposition systématique alors que tant de choses sont à élaborer ensemble.
Fidèle à sa tradition pédagogique, le SAEN continuera de privilégier la discussion, la réflexion commune, l’écoute des différents partenaires de l’école et la recherche de solutions équilibrées. Pour cela, il est souvent nécessaire de négocier des compromis (provisoires), de penser évolution plutôt que révolution. Cette « politique des petits pas » n’est pas toujours facile à mettre en avant, surtout auprès des plus lésé·es, mais elle est à notre sens garante d’une construction progressive et durable de l’école de demain, capable de s’adapter à une société en transition rapide et continue.
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