Réseaux sociaux : prendre conscience de ses propres pratiques

Selon l’enquête JAMES (Jeunes, Activités, Médias, enquête suisse), menée par l’Université des sciences appliquées de Zurich et publiée en 2022, pour la tranche d’âge des 7-8P, dans une classe de vingt élèves, les trois quarts sont déjà actif·ves sur les réseaux sociaux.

Si ces quelques chiffres témoignent de l’engouement des jeunes pour ces plateformes ( près de 90 % des sondé·es utilisent les réseaux sociaux « tous les jours/plusieurs fois par semaine » ), cette même étude met également en lumière la face ( plus ou moins ) cachée de ces communautés en ligne. Sur les 976 jeunes sondé·es, 23 % de la tranche des 12-13 ans déclarent avoir déjà rencontré dans la vraie vie une personne dont ils·elles ont fait la connaissance sur internet.

Alors, à quel moment les pratiques numériques à priori inoffensives des adolescent·es demandent-elles une attention particulière ? Comment les aiguiller et les aider à développer un esprit critique face aux fonctionnalités florissantes développées dans le but de capter toujours plus leur attention et de les encourager à partager toujours plus d’informations privées ? Comment les aider à décortiquer leurs propres pratiques et y identifier de potentielles dérives ?

Pour répondre à ces questions, une équipe d’expert·es du Centre LEARN1, en collaboration avec l'équipe de l'Office de l'informatique scolaire et de l'organisation ( OISO ) du canton de Neuchâtel, s’est penchée sur la conception d’une « Formation à la citoyenneté numérique » afin de doter les enseignant·es d’une culture commune et d’outils permettant de structurer leur démarche de sensibilisation auprès de leurs élèves. Cette formation, qui sera délivrée au cours des prochaines semaines dans un établissement neuchâtelois auprès d’une dizaine de participant·es, s’appuie sur le modèle réflexif développé en collaboration avec des enseignant·es, des chercheur·euses et des sociologues. C’est avec cette grille de lecture comme point de départ que l’équipe, composée de Frédérique Chessel Lazzarotto, Sonia Agrebi et Felipe Martinez, a développé un contenu de formation visant à introduire la démarche réflexive, échanges autour des vécus spécifiques des enseignant·es vis-à-vis de leurs classes et enfin, des exercices pratiques permettant d’appliquer le modèle dans des scénarios réalistes.

C’est lors de la mise en situation proposée par l’un de ces scénarios que la démarche prend tout son sens. À partir de l'analyse d'une situation numérique, les élèves situent la problématique dans leurs différentes pratiques et désignent les bienfaits et les risques associés. Ils·elles découvrent ensuite quels sont les mécanismes numériques qui amplifient le phénomène en observant, nommant et catégorisant les fonctionnalités offertes par ces outils. Dans une deuxième séance, ils·elles vont pouvoir exercer leurs choix parmi ceux qui apparaissent dans leurs pratiques : choix des contenus à partager à partir de l'évaluation de profils et de traces de comptes imaginés ; choix des paramètres dans les applications, choix de son identité en ligne ... Une dernière partie permet de transférer les apprentissages précédents dans des situations fictives afin de pouvoir engager les élèves à exercer leur esprit critique et formuler des comportements responsables.

Les activités se basent sur le moyen choisi par le canton et intègrent aussi d'autres ressources libres ou créées pour la formation. La première session destinée aux référent·es numériques a permis de tester les modalités de ce temps de formation. Afin de connaitre l'efficacité de nos formations non seulement au niveau des enseignant·es, mais aussi des élèves, nous collecterons systématiquement des données lors de nos interventions et lors de la mise en œuvre dans les classes. Nous attendons donc maintenant le retour des élèves qui suivront prochainement cette séquence.

Centre LEARN, EPFL