Les langues «étrangères», un passeport pour la réussite scolaire?
Un pavé dans la mare, oui, c’en est un. Mais parfois, il faut savoir se mouiller – quitte à s’attirer les foudres – pour que des idées se fassent entendre. Alors que le débat sur l’apprentissage précoce des langues au niveau primaire fait rage dans notre pays, il me paraît important, à ce stade de réflexion, de s’interroger également sur la place des langues dans la réussite scolaire.
Dans notre canton, la rentrée scolaire 2014, ayant pour titre «les langues, un passeport pour l’avenir», était bel et bien axée sur les langues. Comme il l’a déjà été mentionné, le canton de Vaud devait se positionner sur cette thématique en raison des débats relatifs à l’apprentissage précoce des langues nationales et/ou étrangères. Il l’a fait tout comme la CIIP et la CDIP en confirmant leur engagement en faveur de l’apprentissage de deux langues étrangères au primaire.
Force est de constater que les langues deviennent de plus en plus un passeport pour la réussite scolaire, l’allemand prenant une place prépondérante durant le processus d’orientation vaudois en fin de 8P. L’anglais, qui sera prochainement rajouté aux critères de sélection en fin de 8P, pourrait influencer encore davantage la sélection. E
n 2003, les thèses du Syndicat des enseignants romands relatives à l’enseignement et à l’apprentissage des langues étrangères étaient déjà très claires: «La part de l’enseignement/apprentissage des langues dans le processus doit être relativisée.» Comme démontré plus haut, ce n’est malheureusement pas le cas aujourd’hui et ne le sera certainement pas demain. Les résultats de l’enquête de l’introduction du nouveau moyen d’enseignement anglais More! dès la septième année ont mis en exergue un certain nombre d’éléments qui doivent pris être en compte dans la réflexion de l’évaluation des langues. Notamment, il est relevé que même s’il est possible d’intégrer tous les élèves dans cet enseignement, la recherche mentionne que l’écart entre faibles et forts élèves s’accentue et que la faible présence de pistes dans la méthodologie pour la différenciation ne va aucunement diminuer ce processus d’accentuation.
Quelques soucis quant à l’introduction de ce moyen, en lien direct avec la problématique d’évaluation des langues étrangères, sont également présentés. «La pression exercée par les notes risque d’alourdir un programme déjà chargé en 8H et d’avoir des conséquences négatives sur la motivation à apprendre l’anglais.» De plus, cette pression des notes va «(…) générer des pratiques d’enseignement et d’évaluation davantage axées sur l’écrit et les connaissances isolées de grammaire et de vocabulaire». Il paraît donc évident que l’évaluation de l’anglais – et nous pourrions aisément rajouter celle de l’allemand – tend à accentuer la sélection, l’écart entre les élèves, alors que l’objectif premier d’un apprentissage d’une langue étrangère ou nationale est que l’élève puisse communiquer.
Peut-être faut-il donc (ré)organiser l’infrastructure nécessaire pour un enseignement moderne des langues étrangères? Avoir également une réflexion profonde sur le statut de l’enseignant et de sa formation? Car plus d’une fois, il est démontré que la structure de l’école et le statut de l’enseignant sont déterminants dans la réussite de l’apprentissage des langues étrangères. Devrions-nous ainsi évaluer les langues «étrangères » au primaire?
Oui, on continuera d’évaluer, car les enseignant-e-s le font dans chaque acte pédagogique. Mais cette évaluation ne devrait pas être prise en compte dans l’orientation, car l’apprentissage des langues – tant l’allemand que l’anglais – est au service des compétences de communication à développer pour chaque élève et non au service de la sélection. Il faut donc maintenant intégrer la question de l’évaluation dans ces intenses discussions portant sur l’enseignement des langues étrangères au primaire. Certes, dans ce débat, les cantons ont leurs propres compétences.
Alors, osons aborder la question de l’évaluation des langues étrangères dans notre canton!
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