Heurs et malheurs de la régionalisation
Certain-e-s s’en souviennent peut-être: dans les dernières années de la législature Perrinjaquet, il avait été fortement question de donner un statut cantonal aux écoles de la scolarité obligatoire. Les villes (y compris Valde- Travers) étaient alors vivement montées aux barricades pour défendre leur pré carré. Succédant à sa collègue de parti, Philippe Gnaegi s’était empressé de régionaliser l’école avec le soutien des communes.
Sitôt connues les premières intentions du DECS de l’époque, le SAEN avait exprimé ses craintes, considérant qu’il n’y aurait probablement pas plus d’avantages à attendre d’une régionalisation que d’une cantonalisation. Le SAEN redoutait une évolution qui conduirait à un gonflement administratif avec l’apparition d’un nouveau niveau hiérarchique à l’école primaire se traduisant par plus d’argent dépensé pour des directeurs, argent qu’il faudrait économiser, vu les contraintes budgétaires actuelles, sur le dos des enseignant-e-s, des enfants et de leurs familles, par le biais de regroupements de classes et d’une généralisation de celles à deux ordres pour aboutir partout à de gros effectifs. L’entrée en fonction de toute une série de nouveaux directeurs risquait en outre de poser problème. A côté d’individus remplissant admirablement bien leur fonction, certains «grimpions» abuseraient inévitablement de leur pouvoir et nécessiteraient des réactions syndicales parfois musclées. Enfin, selon le SAEN, la pédagogie devait rester l’apanage des professionnels du terrain, les enseignant-e-s!
Est-ce que les gens naissent égaux en droits à l’endroit où ils naissent?
Généralisée au début de l’année scolaire 2012- 2013, la régionalisation entame donc sa deuxième année. Un premier bilan peut en être tiré et les pronostics du SAEN sont hélas vérifiés pour l’essentiel. Mais, et ça devrait être rassurant, dans la grande majorité des cas, cela se passe quand même plutôt bien… Les réussites semblent liées à quelques facteurs. Le principal tient au respect manifesté aux enseignant- e-s, dont les représentants sont associés aux décisions engageant l’avenir du centre scolaire, voire du cercle. Les directions qui ont fait le pari du partenariat en sont visiblement sorties gagnantes. Les enseignant-e-s peuvent comprendre qu’il y ait des choix douloureux à faire dans la composition et la répartition géographique des classes; en associant leurs représentants à la recherche de solutions, les directions ont de bonnes chances de voir apparaître des scénarios qu’elles n’avaient pas envisagés… et qui s’avèrent finalement parfois mieux adaptés à la situation.
Hélas, on doit déplorer des cas révélant de graves dysfonctionnements dans la direction de certains centres. A l’inverse de ce qui a été décrit ci-dessus, on a alors le plus souvent affaire à des directions vivant dans leur tour d’ivoire. Le respect fonctionne à sens unique, selon la logique hiérarchique. Bien trop souvent, ces cadres-là n’ont de contact avec leurs enseignant-e-s que dans des situations privilégiant un rapport de soumission hiérarchique (consignes à appliquer, arbitrages entre enseignant-e-s et famille, constitution des classes…). Dans les salles des maîtres, on regrette que l’attitude de certaines de ces personnes tende à compliquer et à alourdir le travail des enseignant-e-s dont elles ont la responsabilité au lieu de le faciliter. De toute évidence, on peut se demander si certaines d’entre elles sont vraiment à leur place et, dans le cas contraire, quelles mesures l’autorité* peut prendre pour corriger la situation. Bizarrement, à notre grande surprise, il semble que les membres des directions nommés au moment de la mise en place de la régionalisation l’ont été – sans période d’essai – pour une période de quatre ans!
Urgence
Certes, la grogne ne concerne qu’une minorité des centres scolaires, mais les enseignant-e-s concerné-e-s et leurs élèves méritent les égards accordés à leurs collègues. Il est temps d’agir si l’on veut éviter que la régionalisation débouche sur une école neuchâteloise à sept ou treize vitesses!
*Quelle autorité, au fait ? Les ailes du SEO ont, semble-t-il, été sérieusement rognées…
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